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Atelier littéraire


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    Deuxième prix du 1er concours de la nouvelle courte Praxis Negra : Philippe Guerrini

    Dominique Giudicelli
    Dominique Giudicelli
    Admin

    Messages : 397
    Date d'inscription : 28/02/2014
    02092014

    Deuxième prix du 1er concours de la nouvelle courte Praxis Negra : Philippe Guerrini Empty Deuxième prix du 1er concours de la nouvelle courte Praxis Negra : Philippe Guerrini

    Message par Dominique Giudicelli


    Comme si de rien n'était... Marcher sans fin, n'être qu'un élan. Comme si la vie se résumait à l'errance.
    Deuxième prix du 1er concours de la nouvelle courte Praxis Negra : Philippe Guerrini Giacom11
    L'homme qui marche. Alberto Giacometti.


    Lui
    Je m’appelle… peu importe… là n’est pas l’essentiel… ni d’où je viens d’ailleurs… de toute façon je n’ai plus le moindre souvenir… trop de brûlures, de blessures profondes, d’écorchures vives, de morsures cruelles… trop d’alcool, trop de drogues, d’anxiolytiques, d’électrochocs, de douches froides, de camisoles peut-être ? Ma mémoire est aride, stérile, vide. Je n’ai pas d’histoire, pas d’identité, pas de toit, pas de travail, pas de femme, pas de famille, pas de désir non plus… Je marche sans but… d’un pas égal, insensible aux caprices du temps… les pieds meurtris par les aspérités des chemins et des routes qui ne mènent nulle part… somnambule né d’une nuit peuplée d’ombres indécises. Je marche sans fin… fils de mes seules enjambées régulières… les muscles brachiaux saillants sous le poids de deux énormes sacs en cuir… Ma vie se résume à l’errance perpétuelle… un chemin de croix peut être ? Un ancien marathonien ? Un homme fuyant le génocide ? Non, ni jésus… ni zatopek… ni juif… ni palestinien… ni kurde… Merde, je dois marcher plus vite… tout oublier, effacer, chasser, enfouir, noyer, enterrer, ne rien laisser affleurer… verrouiller l’inconscient… trucider l’émotion… étouffer l’anamnèse… ne pas transpirer même… anhidrose… annihiler la moindre gouttelette de sueur… de foutre… d’urine… contrôler toute manifestation infime du corps… N’être qu’un élan… un souffle… un froissement… un élément du décor. Une tour génoise aux pieds de sable où le soleil se couche, projette en contrebas son ombre sur une femme silhouette découpée sur le bleu d’une mer turquoise. Ne rien voir, ne rien entendre, ne rien ressentir, ne pas exister, accélérer encore, comme si de rien n’était.

    Elle
    « Il faut tuer le père…  » Putain où est-ce-que j’ai lu cette connerie ? Tuer le père moi je veux bien, mais quand il est déjà mort ? On fait comment ? Pff !
    On reste toute debout, les pieds dans la mer avec ces connes de vagues qui me lèchent les orteils, ce paysage si beau qu’il sert à rien…
    M’enfoncer… voilà m’enfoncer dans l’eau, boire la coupe jusqu’à la lie… d’abord les chevilles… Le froid me hérisse la pointe des seins, puis quand le corps s’habitue m’enfoncer davantage. Allez ! Les mollets, la peau des cuisses qui se tend, là où c’est doux ça devient rêche… Le pire c’est le ventre… j’avance, j’avance jusqu’aux épaules, je flotte, et doucement entière dans l’eau de mer… sans souffle retenu… Je lévite… Je laisse aller… Je ne résiste pas.
    Je suis toute entière dans l’eau bleue, transparente, verte, grise, les bras écartés, les pieds au-dessus du sol, les cheveux défaits. J’entends le sang battre dans mes oreilles… Qu’est-ce que ça doit faire de se noyer ? Comment on fait ? On avale un grand coup ? On ouvre la bouche, l’eau rentre dedans, et en même temps on respire ?

    Lui
    Mes jambes flageolent, mes muscles se tétanisent, mes tempes et mon cœur battent la chamade, de grosses gouttes de sueur perlent sur mon front buriné, mille trompettes semblent sonner ma capitulation. Merde, je m’immobilise ! Je titube ! Je trébuche ! Je chois ! Vite ! Surtout me redresser, mettre un pied devant l’autre, avancer bordel ! Continuer jusqu’à la fin à fouler la terre, ne pas interrompre l’inaltérable balancier du corps. Être l’égal du pendule de Foucault ! Un mouvement perpétuel… Bilbao… musée Guggenheim… quelle année ?...    Ce n’est rien qu’une faiblesse passagère, un aléa sans conséquence. Je le sais je vais repartir, il le faut ! Je tends tout mon être vers cet unique sens… ce sens unique… vital… Marcher à l’infini… sans retour… marcher à me déchirer la peau… me brûler les chairs… me briser les os… assécher le liquide rougeâtre dans mes veines… liquéfier mon cerveau… devenir humus, excrément, pourriture… Mais jusque là ne pas se souvenir… ne pas penser… non, pas de devoir de mémoire…
    Putain, je reste cloué au sol, paralysé, naufragé, noyé dans l’eau bleue transparente d’une mer d’asphalte… je m’enfonce dans le goudron bouillant… le sang me bat aux oreilles… ne plus respirer… bouche béante… tout avaler… être avalé à son tour… la tour de Fautea en contrebas de la route… je vois une femme maintenant totalement recouverte par les vagues de la tyrrhénienne… et moi son pendant noyé dans cette terre mienne… dans cette terre hyène… où je m’enfonce inéluctablement…

    Elle
    Je sors la tête de l’eau et j’aperçois cette tête de con qui semble émergée de l’asphalte… je ne peux quand même pas sortir de l’eau à poil devant cet hurluberlu en casquette et parka de fourrure par 40 °C à l’ombre !
    Est-ce que cette andouille va dévisser du bord de la route avec ses sacs à dos pourris et ses yeux fixes de moribond ? Pour peu qu’il croie que je me noie, il va se faire un devoir de me sauver ! Ou alors il veut voir si j’ai gardé ma culotte ? Ou bien alors je sais pas il se dit que, seule, je cherche forcément de la compagnie… Ou alors il me trouve si belle dans cette eau bleue, dorée au soleil couchant, qu’il ne se lasse pas d’admirer le tableau ! En tout cas il ne bouge pas hein ! Il prend racine ou quoi ?!

    Lui
    Tiens ! Je vois son visage ! Plutôt mignonne la caille ! Je parie qu’elle a enlevé sa culotte ! Je sens une raideur entre mes jambes. Je bande ! Je l’avais oublié celui-là ! Je le croyais mort ! Mais non ! La vue de cette jolie naïade a réveillé Hector… Hector quel nom étrange pour une queue ! La mienne en l’occurrence qui fait de la résistance comme le héros troyen éponyme ! L’endroit par où la mémoire semble me revenir. Je la reluque à nouveau. Ses seins flottent à la surface de l’eau. Menus en forme de poire. Les bouts dressés par le froid. À moins que je lui fasse de l’effet ? Elle me regarde ! Elle doit me trouver con, engoncé par 40°C à l’ombre dans ma parka fourrée, les yeux exorbités et à moitié mort ! Un liquide chaud et gluant s’échappe de mon sexe et mouille mon slip. Merde ! J’ai éjaculé !
    Heureusement, de loin, elle ne peut voir mon sexe raide et trempé ! Elle pourrait sortir de l’eau, la conne, que je la vois à poil ! Mais rien ! Elle ne bronche pas ! Je l’imagine nue sur le sable ! Hector frétille et étend à nouveau son domaine. La guerre de Troie n’aura pas lieu mais le guerrier est en vain prêt au combat. Dix ans au moins qu’une femme n’avait plus éveillé en moi le moindre désir. Allez ! Va falloir que je me bouge !

    Elle
    Ce mec me fout franchement la trouille… j’ai beau faire la fière, ça devient carrément glauque cette baignade solitaire qui se transforme en spectacle vivant d’une morue matée par un vieux loup solitaire, peut-être un furieux agresseur potentiel, pété du casque ou allégé du cervelet ?
    Je me glace dans cette eau ! Comment je vais faire, maman ! Qu’est-ce que je suis venue me noyer ici ? Et ce type qui commence à bouger. Il me prend pour un objet sexuel! Il se fait une projection privée non-consentante ! Hè ! Tu entends ! Je t’emmerde gros con de mateur à la nouille frétillante ! Si tu t’approches je te fous mon pied dans les couilles ! Enfin si j’ai le temps ! L’ignorer ! Voilà l’ignorer. Le rendre lui-même transparent ! Qu’il me fiche la paix !

    Lui
    Suis sûr qu’elle pense que je la mate ! Elle ne bouge pas d’un poil. Elle doit se geler les miches la sirène ! Allez ! Un petit effort ma belle ! Sors de la mer ! Étale ton corps frémissant d’Aphrodite estivale et étale tes rondeurs vestales dans mon axe focal ! Consternant ! Poésie rampante et hellénisme facile ! Je dois délirer. Le retour au désir réactive mon champ mnésique. À ce rythme-là, je ne vais pas tarder à retrouver une identité. Ce que j’ai chaud ! J’enlève ma parka. Je pivote sur moi-même. Tiens, je ne la vois plus ! Elle osera peut-être ainsi rejoindre la plage. Allez ! Hisse ! Je sors de mon trou.

    Elle
    Le voilà disparu ! Je sors de l’eau… De la plage ourlée d’écume blanchâtre, genre bave d’épileptique, je peux voir mon profil. Il regarde au loin. Il ne me regarde plus.
    Je me précipite sur ma serviette XXL pour sécher ma peau fripée d’être restée trop longtemps dans la grande Bleue.
    Je me trouve moche… Mes cuisses sont grasses, mes seins se débinent, mes jambes sont bleuies par les veines et les peines, derniers stigmates d’une maternité.
    Les cheveux collés sur le front, avant longs et blonds, témoignent d’une fatigue reléguée au quotidien dans un improbable repos. Ils sont si sales qu’on croirait de la laine de verre. Mes ongles sont noirs, sans parler du reste !
    Cet homme me ressemble finalement. Cabossé aussi sûrement que je le suis. Moi j’ai pu garder un semblant de dignité qu’il semble avoir perdu tout à fait… l’apparence ne lui servant même plus d’alibi à vivre comme tout le monde.
    Ici et maintenant, cet homme est un avertissement, un miroir tendu.
    Je ne veux pas mourir.
    Je m’assois sur le sable et entre mes jambes, prenant bien soin de retirer ma serviette de plage, je vomis tout en vrac… Entre deux hauts-le-coeur, je ris de l’image de la jolie pépée prenant son bain à l’abri des regards, et qui maintenant se trouve secouée de hoquets verdâtres et bileux.
    Je vomis tout ce qui m’encombre. Le sang bat à mes tempes. Je manque de m’étouffer, mais qu’est-ce que ça me libère ! Habitude prise dans l’enfance de rejeter violemment tout ce que je n’arrive pas à avaler. Très tôt, j’ai gerbé tripes et boyaux pour faire place neuve enfin et rendre, c’est le terme, à César ce qui ne m’appartient pas. Merde, il est là derrière moi !

    Lui
    Mais vous vomissez ! Vous avez bu la tasse ? Vous tremblez…

    Elle
    … J’ai froid.

    Lui
    Tenez prenez ma parka ! Je vous observais de la route. J’ai pensé que vous vouliez vous noyer. En finir avec la vie quoi !

    Elle
    (Elle enlève le blouson de ses épaules avec un haut-le-coeur. La veste pue la mort) Merci ça va aller. Et puis je suis assez grande pour savoir si j’ai froid ou pas. Et je préfère le froid à l’asphyxie à la peau de chameau en rut.

    Lui
    C’est comme vous voulez ! (sortant un paquet de cigarettes) une cibiche ?

    Elle
    Je ne suis pas obligée d’avoir le cancer du poumon en plus ?

    Lui
    Vous êtes en villégiature ?

    Elle
    pourquoi ça ne se voit pas ? (Tous les deux regardent la mer)

    Lui
    Vous n’avez pas peur de vous faire agresser par un satyre en vous baignant nue ici toute seule ?

    Elle
    Pourquoi ? Je devrais ?

    Lui
    Si c’est pour moi que vous dîtes ça, ne craignez rien ! Je n’aime pas les femmes, les enfants, les chiens et les pétasses blondes qui gerbent à la tombée du jour.

    Elle
    Vous êtes vraiment vexé, hein ?! Mais sincèrement ça fait combien de temps que vous marchez comme ça sans faire un arrêt aux sanitaires du camping ?

    Lui


    Elle
    Ecoutez, je suis venue ici pour être seule, pour être tranquille, pour me noyer peut-être. Je ne vous connais pas, vous puez, ça fait une demi-heure que vous me mater depuis la nationale, franchement si c’est vous mon ange gardien, ils ont fait fort là-haut !

    Lui
    Il ne faut pas se fier aux apparences…

    Elle
    Ecoutez, j’ai jamais eu l’intention d’en finir avec la vie. Je dirais même que j’aimerais bien qu’elle commence un peu ma vie. Alors ne vous inquiétez pas pour moi, continuez votre route. (Elle a les larmes aux yeux)

    Lui
    C’est dur hein ! Vous voulez que je reste un peu avec vous ? Le temps que vous… enfin… ouais… je peux rester encore un peu avec vous ? Le temps que… je me repose. Je fais la route. Je marche de 6 heures à 6 heures. J’aime bien les comptes ronds.

    Elle
    et vous allez où ?

    Lui
    Je vais… je cherche un grand précipice bordé de falaises, une faille énorme de granit, un canyon… je l’ai vu dans un rêve comme si j’y étais, alors je sais et je cherche et je trouverai…

    Elle
    vous vivez où ? Vous avez une maison, une famille, un lit ? Qu’est-ce que vous foutez sur la route ? Vous allez où et pourquoi ?

    Lui
    J’hésite. Quand je vais vers le Nord, le Sud m’attire. Quand je suis au Sud le Nord me manque… c’est comme qui dirait une valse permanente entre les deux extrêmes de moi-même… avant j’étais à peu près au milieu, disons que j’arrivais en somme à rester au milieu…

    Elle
    Mais de quoi vivez-vous ?

    Lui
    Quand je ne marche pas, je reste dans le blanc, je dors et je mange.

    Elle
    Dans le blanc ?

    Lui
    Ben oui, dans une espèce de dortoir blanc ! Les gens sont blancs, les assiettes sont blanches, les draps sont blancs, les cachets sont blancs aussi…

    Elle
    C’est l’hôpital ! Sans rire, vous me faites un peu peur quand même. C’est incroyable ce mélange de lucidité et de poésie dépressive en vous !

    Lui
    J’aime le son de votre voix. J’aime que vous écoutiez. J’e n’aime pas les questions !

    Elle
    Vous avez aimé dans votre vie ? Je veux dire une femme ?

    Lui
    Je n’aime pas les questions je vous dis ! Par contre vous vous êtes une véritable machine à en poser hein ! Ça vous vient d’où cette envie de trouver toujours toutes les réponses et à n’importe quel prix ? Il y a des secrets dans la vie. Il faut les respecter… c’est notre condition d’homme d’être petit face à l’immensité de l’univers. Une question de décence. Vous avez un vieux chagrin. Ca se voit !

    Elle
    Mon plus gros chagrin c’est de n’être que ce que je suis. Une femme de travers avec dans mon ventre, en boule de feu, la curieuse impression de chercher jusqu’à l’épuisement des raisons de m’aimer et de me laisser aimer.
    Des hommes m’ont aimée, je les ai tous perdus, je les ai tous usés à force d’épreuves. C’est comme si je ne trouvais jamais la faille, le bout du monde, le canyon, le repos, la sensation d’être arrivée, enfin. J’ai de la ressource vous savez, la nature m’a dotée d’un tempérament de marcheuse… je marche, je marche mes paquets au bout de chaque bras, pour l’équilibre, parce que malgré tout je suis vivante, parce que j’aime les comptes ronds, j’aime que tout soit harmonieux. Les gens qui me voient passer se disent : quelle force ! Quel courage ! Quelle folle ! Mais où va-t-elle et pourquoi ?

    Lui
    Ils doivent se poser les mêmes questions à mon égard ! Il paraît qu’un groupe de chanteurs corses, « Eramu in campu » je crois, aurait même composé une chanson à mon sujet.

    Elle
    Vous commencez à être célèbre ! Méfiez-vous des récupérateurs de tout poil ! Les routards déjantés excitent les foules ! Bon ! Je dois repartir. Je ne suis pas encore arrivée ! Je le sais !

    Lui
    Attendez ! Comment vous appelez-vous ?

    Elle
    Je m’appelle… peu importe… là n’est pas l’essentiel… ni d’où je viens d’ailleurs… de toute façon je n’ai plus le moindre souvenir… trop de brûlures, de blessures profondes, d’écorchures vives, de morsures cruelles… trop de je t’aime, je t’aime plus, je t’aime mais… trop d’anxiolytiques… d’électrochocs… de douches froides… ma mémoire ?
    L’amour tu n’en auras pas ! Regarde l’amour ce que c’est : ta mère qui pleure, ton père qui hurle, tes peurs d’enfant serrées contre toi ; tu ne sais pas aimer, tu ne peux pas être aimée. Tu ne peux rien donner rien recevoir sans le mettre en doute… aride… stérile… vide…
    ton désir t’affole. Tu as peur de l’exemple. Tu cherches un autre chemin, tu te perds, tu appelles au secours sans pouvoir prendre une main secourable. Tu ne mérites rien et tu ne peux rien, les pieds meurtris par les aspérités des chemins et des routes qui ne mènent nulle part… Somnambule née d’une nuit peuplée de deux ombres meurtrières et fécondes… je marche sans fin… fille de mes seules enjambées régulières… les muscles brachiaux saillants sous le poids de deux énormes sacs … Ma vie se résume à l’errance perpétuelle… Merde… je dois marcher plus vite… tout oublier, effacer, chasser, enfouir, noyer, enterrer… ne rien laisser affleurer… verrouiller l’inconscient… trucider l’émotion… étouffer l’anamnèse… ne pas transpirer même… anhidrose… annihiler la moindre gouttelette de sueur… de mouille intime… d’urine… contrôler toute manifestation infime du corps… N’être qu’un élan… un souffle… un froissement… un décors… arbre… pierre… goudron… terre… sable… vent… pluie… soleil… neige… Je suis mon île amnésia !
    Tiens ! Le soleil se couche sur la tour génoise… En contrebas un homme s’enfonce dans le bleu de la mer… Non… ne rien voir… ne rien entendre… ne rien ressentir … ne pas risquer l’hécatombe… accélérer encore… Comme si de rien n’était !


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