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    Le déjeuners des canotiers (Barbara Morandini)

    Barbara Morandini
    Barbara Morandini

    Messages : 39
    Date d'inscription : 28/02/2014
    20032014

    Le déjeuners des canotiers (Barbara Morandini) Empty Le déjeuners des canotiers (Barbara Morandini)

    Message par Barbara Morandini

    Après Chagall, Barbara Ettori-Morandini nous livre des clefs à propos de Renoir, et d'un tableau impressionniste des plus célèbres. Pour une chronique originale, où l'on vit l'instant pour décoder l'oeuvre.

    Le déjeuners des canotiers (Barbara Morandini) Renoir10

    Nous sommes le 20 mai 1880 à l'Auberge du père Fournaise.
    Un groupe d'amis se réunit comme chaque dimanche.
    Il fait assez chaud, le repas a été frugal, seulement un peu de charcuterie, du fromage, des fruits et du vin surtout. On a surtout beaucoup bu, comme à chaque fois.

    Il y a Hippolyte, Aline, Gustave, Ellen,  Raoul, Alphonsine, Angèle et les autres.  Il y a aussi Auguste, c'est à travers ses yeux qu'est vue la scène.
    Le temps s'est arrêté un instant en ce jour de printemps.
    Tous se connaissent depuis longtemps, depuis toujours presque.
    A les voir ainsi, on les croirait heureux mais ces personnes concentrent à elles seules pratiquement tous les maux d'amour possibles.


    Auguste est peintre, il est marié à Aline, c'est la jeune femme à gauche,qui s'amuse avec le petit chien. Auguste et elle n'ont pas d'enfant, elle n'a que ce chien, elle lui donne toute l'affection inutile que ses hormones lui crient.
    C'est Auguste qui n'en veut pas. Quand ils ont compris qu'ils s'aimaient, il lui a dit, le plus sérieusement du monde qu'il souhaitait par dessus tout vivre de son Art, vivre pour son Art. Autrement dit survivre. Il ne voulait pas faire d'enfant et être contraint, par responsabilité, d'entrer dans un moule. Il lui a demandé alors de partir, de le laisser, le sacrifice était trop grand selon lui.
    Elle est restée, très malheureuse, mais a adopté ce chien... Entre temps, il ne l'aima plus. Il en souffre mais ne peut se résoudre à la quitter. Il n'en a plus le droit.

    A califourchon sur la chaise, à droite, il y a Gustave.
    Gustave ne sait pas si ses amis l'aiment pour lui ou pour son fric.
    Comme Ellen en ce moment, qui est assise à coté de lui.
    Elle voit en Gustave l'occasion de sortir de la misère dont sa passion pour la comédie l'a plongée. Elle est actrice.
    Elle est persuadée que l'argent de Gustave lui permettrait d'avoir du succès mais il ne semble pas la voir.
    Gustave est millionnaire et au grand damne de ses parents il fréquente cette petite troupe de « bohémiens » comme les appelle son père.
    Il les entretient un peu et n'osera jamais avouer que c'est parce qu'il aime désespérément Aline, qu'il ne peut s'empêcher de dévorer des yeux, surtout quand il a bu comme aujourd'hui.

    A l’arrière plan, la femme accoudée à la rambarde c'est Alphonsine.
    Auguste et elle se cherchent du regard depuis longtemps. Il voit bien qu 'elle n'est pas indifférente à son charme, contrairement à celui de ce pauvre Raoul qui lui récite des poèmes depuis deux heures environ. Raoul est baron ! Un baron-poète !  

    Les femmes ont toujours été plus attirées par les silencieux comme Auguste. Le mystère, elles aiment ça. Elles comblent le silence par ce qu'elles veulent... C'est pratique ! Un jour Auguste peindra Alphonsine (Il appellera ce tableau « La femme à l'éventail » il le sait déjà) et ils iront plus loin que des regards, ce n'est qu'une question de temps. En ce moment, ils se comprennent, sans se dire un seul mot,  mais Auguste ne l'aimera jamais autant qu'elle, il la rendra malheureuse. Auguste a ce don, il captive les femmes mais son drame c'est qu'il les rend malheureuses également. A travers lui elles ressentent la vie et toutes les émotions extrêmes qu'elle peut susciter. Du bonheur intense au profond désespoir.


    Par exemple, Auguste sent sur lui le regard d'Angèle. Elle est au centre du groupe mais seule. Elle boit, elle n'a fait que ça de toute la journée. Boire et fixer Auguste. Il n'y a rien de plus triste, de pathétique, qu'une femme bafouée et délaissée. Elle a longtemps été son modèle. Bien entendu ils se sont aimés mais Auguste s'est lassé, comme à chaque fois. Il y a deux sortes d'amour : l'inconditionnel, l'infini et celui à « points».
    Au début rien ne différencie ces deux amours puis un jour l'un des deux « désaime » , son amour décline petit à petit pendant que celui de l'autre reste a son summum. Elle le fixe et ce regard semble lui hurler l'injustice de ce désamour !! Elle ne le comprend pas.

    Hyppolite, à gauche, debout, appuyé sur la rambarde, ne comprend pas non plus. Qu'une belle jeune femme comme elle s'enlaidisse autant pour un fou. Lui héritera bientôt de ce restaurant, c'est une vie stable qu'il proposerait à Angèle si il osait. Une vie de patronne qu'elle refuserait, pour sûr ! Qu'ont toutes ces femmes avec ce « Auguste » ? Sa sœur Alphonsine semble comme hypnotisée également...

    Plus tard Auguste, ayant fini de peindre cette scène, se rendra compte que treize personnages y sont présents.

    Par superstition, il prit alors la décision d'y ajouter un quatorzième, naturellement il décida de se peindre lui-même parmi ces « proches ». C'est auprès d’Angèle qu'il s'installa, pour l'observer de près. Pour essayer de capter dans ses yeux cette lueur, cette folie dont il est la raison, pour tenter de la comprendre. Il n'y arrivera jamais.

    Barbara Ettori-Morandini

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