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    Raio de sol, par Hubert Canonici

    Dominique Giudicelli
    Dominique Giudicelli
    Admin

    Messages : 397
    Date d'inscription : 28/02/2014
    11062014

    Raio de sol, par Hubert Canonici Empty Raio de sol, par Hubert Canonici

    Message par Dominique Giudicelli

    Derrière les stades, les favelas, leur noirceur sucrée, leur chaleur rouillée. Et un raio de sol...



    Raio de sol, par Hubert Canonici Iris_d10
    photo Iris Della Rocca

    Le grand christ domine la ville et regarde vers la mer.
    À imaginer qu'il pense, il dit :

    - Si je marchais sur l'eau, on dirait encore que je ne sais pas nager !

    Dans la favela, le frère et la sœur se réveillent tard dans leur carré poisseux.
    Lui est doué en mécanique, il trouve toujours du boulot dans de petits garages miteux; quand il lui reste un peu d'argent, il achète du poisson pour ses vieux.
    Elle est lumineuse, les voisins l'appellent " Raio de sol " ; elle se prostitue en restant une princesse dans sa tête...

    - T'as pas puté aujourd'hui, on va bouffer des mangues à en pleurer sur l'absence du bon salé!

    - Bouffe mon cul que voilà comme un chou-fleur en étalage !

    - T'es ma sœur, non? Point envie de freiner en pente raide avec mes chicots sur du tuf !

    La favela est plombée de soleil, les mangues y pullulent et nourriraient les bataillons du monde entier à la file. Que de sucre, trop !
    Le petit singe court sur les câbles aériens, bonne bouille aux yeux pétillants de curiosité, il descend voir si la terre lui réserve quelque chose de bon, il est cueilli par un chat balafré. Adieux rêves de dolce vita...

    - Ferme la porte, attache la ficelle, ils sont là !

    - J'ai peur !

    Elle peut avoir (peur) ; une pute de copine en est revenue d'ici trois jours, ses rustines de nichons coupées, la fente cousue au barbelé. Des dérangés psychédéliques ces riches trafiquants, voyous, hallucinés comme des lucioles en ballet de lampes.

    - Ah Ah ! Ouvre, fais plaisir !

    - Ma sœur la puta n'est pas là. Elle fait la gymnastique chez un gros avocat avec des moustaches grises !

    - Ah Ah ! Je renifle sa chatte !

    Un golpe du pied met la taule à terre. Celui qui a des dents de lapin montre son 357 Magnum chromé avec un sourire Baalbérith!

    - Viens bella puta, faire la fête durante toda a noite! Ah Ah ! Toi, bacalhau, couché!

    Ils emmènent la sœur en la tripotant ; le frère, sonné, a ce regard aux yeux brisés semblable à celui du jeune singe voyant le chat balafré bondir vers lui.
    Entre les taules, dans la case à côté, le couple de voisins se dispute comme d'habitude:

    - Depuis que tu penses à la coupe du monde, tu ne fais plus rien du tout ! Molusco ! Incapaz de ramener le bifteck !

    - Você me cago ! Mange la mangue!

    Aujourd'hui, il n'en rigole pas. Cet univers si humble, où il trouve des joies insoupçonnées, s'ébranle au point de le transformer en une plaie amputée des 3/5 de son âme. Il y a pourtant des cons pour croire:

    - Quand on est pauvre on a rien à perdre !

    Ils n'ont rien, mais tellement à partager ; une vie dure pour des rêves plein les yeux, la vraie poésie appartient aux pauvres.
    Il erre dans une grande avenue, terriblement seul au monde avec son angoisse. La foule déferle avec son lot de touristes ; il les radioscopie d'un regard furtif - de ce couple joyeux de manger une glace, à ce gros hollandais qui bave et sue jusque dans sa raie en pensant à la prochaine gamine qu'il va souiller.
    Sur la plage ça joue au futebol, des fesses rebombées par la chirurgie s'exhibent en mouvements circulaires (Partage, FMI, commerce équitable !!! Foutaises).
    Début de soirée, il remonte chez lui, chez ceux de son rang, miserável. Dans les hautes sphères, on fête la fin des travaux des stades accueillant le Mondial, les volutes de fumée des cigares de la Havane emboucanent des putes de l'Est. Il marche dans la moiteur rouillée des rues de la favela, un attroupement devant un transistor télévision à piles, en noir et blanc, le laisse bleu, pathétique. L'image est enneigée, mais ils sont absorbés par une insipide telenovela.

    Sa sœur sera retrouvée deux jours plus tard, disposée en encyclopédie macabre, décapitée, démembrée, lacérée par des lames effilées, boulotée par des chiens trop miséreux pour avoir des principes.

    Pourquoi pleure-t-il tellement ce soir ? Un an après ?
    Ce vent fruité, ce " Raio de sol " qui perce la nuit noire... Elle le salue.
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