Barbara Morandini poursuit ses chroniques picto-littéraires. Aujourd'hui Mallarmé par James Whistler
Stéphane m'a demandé de faire son portrait. C'est un exercice bien difficile de peindre ceux qu'on aime, voilà pourquoi l'autoportrait ne me dérange pas.
Il réfléchissait à la manière d'illustrer la couverture de son ouvrage « Vers et prose » dans lequel il a souhaité regrouper certaines de ses œuvres, et c'est à moi qu'il a pensé.
Je le connais très bien et, il a raison, ce recueil est celui le plus intime, voilà pourquoi il lui semble opportun d’apparaître, lui-même, en frontispice.
Je ne remets pas en question ce choix esthétique, il me semble logique, mais ce qu'il me demande de faire est périlleux.
Les plus grands l'ont croqué Manet, Picasso, Renoir, Gauguin et même Verlaine, dont ce n'est pourtant pas le métier, s'y est essayé.
Cet homme fascine! Alors pourquoi moi?
Je ne suis pas du genre à être intimidé, on m'a souvent reproché d'ailleurs d'être plutôt imbu de ma personne, plus dandy que bohème, ça gène, ça ne cadre pas...
Je me demande bien les raisons pour lesquelles le public préfèrent les artistes crasseux.
Comme si c'était le prix à payer pour le talent. Ça les rassure, ils ne supportent pas qu'en apparence, on leur ressemble, qu'on puisse les regarder dans les yeux. Sûrement une vie misérable doit être, selon eux, la contre-partie aux dons.
Je me contrefous de ce que peut penser la Terre entière, hormis les gens qui ont mon profond respect.
Stéphane Mallarmé est un génie et j'ai la chance d'être son ami.
Je l'ai rencontré, il y a quatre ans à peine.
Tous deux frôlant la cinquantaine, nous sommes tombés en amitié comme on tombe en amour, c'est la raison pour laquelle, selon lui, je suis le mieux placé pour effectuer son portrait.
Il m'a choisi, moi! Un américain! Avec les talents dont regorge ce Paris que j'aime tant, c'est à moi que cette mission est confiée.
Peu m'importe l'age et la nationalité, comme j'ai déjà eu l'occasion de le dire, de toute manière « je suis né quand et où je veux! »,mais je me demande sincèrement si je suis le mieux placé pour le dessiner. Car ce portrait, finalement, ne sera que ma vision de ce poète qui, lui, est universel.
J'ai pris le parti d'effectuer une lithographie qui lui donnera l'aspect d'un croquis. Ce choix n'est pas innocent. Finalement je ne connais que certains contours de Stéphane, ceux similaires aux miens, ceux dans lesquels je me suis reconnu.
Les personnes qui ne me connaissent pas bien, j'en suis certain, ne me penseraient pas si fragiles, si fugaces si mal armé, comme lui.
En lui donnant cette œuvre, j'ai fait part à Stéphane de mon angoisse, il m'a répondu, le plus beau des compliments: « Ce portrait est une merveille, la seule chose qui ait été jamais faite d’après moi, et je m’y souris. »
Il réfléchissait à la manière d'illustrer la couverture de son ouvrage « Vers et prose » dans lequel il a souhaité regrouper certaines de ses œuvres, et c'est à moi qu'il a pensé.
Je le connais très bien et, il a raison, ce recueil est celui le plus intime, voilà pourquoi il lui semble opportun d’apparaître, lui-même, en frontispice.
Je ne remets pas en question ce choix esthétique, il me semble logique, mais ce qu'il me demande de faire est périlleux.
Les plus grands l'ont croqué Manet, Picasso, Renoir, Gauguin et même Verlaine, dont ce n'est pourtant pas le métier, s'y est essayé.
Cet homme fascine! Alors pourquoi moi?
Je ne suis pas du genre à être intimidé, on m'a souvent reproché d'ailleurs d'être plutôt imbu de ma personne, plus dandy que bohème, ça gène, ça ne cadre pas...
Je me demande bien les raisons pour lesquelles le public préfèrent les artistes crasseux.
Comme si c'était le prix à payer pour le talent. Ça les rassure, ils ne supportent pas qu'en apparence, on leur ressemble, qu'on puisse les regarder dans les yeux. Sûrement une vie misérable doit être, selon eux, la contre-partie aux dons.
Je me contrefous de ce que peut penser la Terre entière, hormis les gens qui ont mon profond respect.
Stéphane Mallarmé est un génie et j'ai la chance d'être son ami.
Je l'ai rencontré, il y a quatre ans à peine.
Tous deux frôlant la cinquantaine, nous sommes tombés en amitié comme on tombe en amour, c'est la raison pour laquelle, selon lui, je suis le mieux placé pour effectuer son portrait.
Il m'a choisi, moi! Un américain! Avec les talents dont regorge ce Paris que j'aime tant, c'est à moi que cette mission est confiée.
Peu m'importe l'age et la nationalité, comme j'ai déjà eu l'occasion de le dire, de toute manière « je suis né quand et où je veux! »,mais je me demande sincèrement si je suis le mieux placé pour le dessiner. Car ce portrait, finalement, ne sera que ma vision de ce poète qui, lui, est universel.
J'ai pris le parti d'effectuer une lithographie qui lui donnera l'aspect d'un croquis. Ce choix n'est pas innocent. Finalement je ne connais que certains contours de Stéphane, ceux similaires aux miens, ceux dans lesquels je me suis reconnu.
Les personnes qui ne me connaissent pas bien, j'en suis certain, ne me penseraient pas si fragiles, si fugaces si mal armé, comme lui.
En lui donnant cette œuvre, j'ai fait part à Stéphane de mon angoisse, il m'a répondu, le plus beau des compliments: « Ce portrait est une merveille, la seule chose qui ait été jamais faite d’après moi, et je m’y souris. »